Pas responsable, donc pas coupable!
Le magazine Sciences et avenir du mois de septembre a consacré un dossier sur les manipulations mentales.
On y trouve notamment un article, intitulé "pourquoi nous acceptons l'autorité?", qui raconte comment, lors d'un faux jeu, des candidats ont été invités à électrocuter l'un des leurs s'il répondait mal.
Le jeu, qui s'appelle "Zone Xtreme", a été conçu par l'auteur et producteur Christophe Nick pour les besoins d'un film documentaire sur la violence au petit écran et devrait être diffusé sur France 2 à la fin de l'année.
X est ligoté sur une chaise.
Y lui pose des questions.
A chaque mauvaise réponse, Y administre à X une décharge électrique de plus en plus forte, jusquà ce que ce dernier perde connaissance et malgré ses cris de douleur.
Y n'agit pas par sadisme, il n'aime visiblement pas ce qu'il est en train de faire, mais il agit sous les ordres d'une animatrice qui l'encourage vivement à poursuivre.
En fait X est un comédien, il ne reçoit pas la moindre décharge et simule la douleur.
Le réalisateur déclare avoir voulu comprendre comment la TV pouvait nous manipuler pour nous conduire à accomplir des actes que nous condamnons en temps ordinaire.
L'expérience avait déjà eu lieu en 1963 aux Etats-Unis, sous couvert de la science, dans un laboratoire de psychologie de l'Université de Yale (Connecticut).
Les décharges électriques allaient de 15 à 450 Volts.
La totalité des 40 volontaires de l'expérience avaient alors infligé une décharge de 265 Volt, équivalent à un choc intense et 65 % d'entre eux avaient continué jusqu'à l'ultime décharge de 450 V, qualifiée de choc violent et dangereux.
Près de 50 ans plus tard, le constat est inquiétant : les résultats obtenus dans Zone Xtrême s'avèrent supérieurs, 81 % des candidats ont torturé jusqu'à la "punition" supposée mortelle, et cela sans aucun intérêt financier, l'indemnité ne s'élevant qu'à 40 €.
Selon le psychologue Stanley Milgram, instigateur de l'expérience de Yale, la soumission à l'autorité produit un changement d'état de l'individu qui passe à l'état agentique : le sujet ressent des scrupules, il a confiance du mal qu'il inflige mais perd son libre arbitre et ne se sent plus responsable de ses actes, se considérant comme le simple "agent" d'une autorité.
Dans son esprit, le vrai responsable devient le représentant de l'autorité ( le chercheur à l'Université ou l'animatrice de Zone Xtrême).
En sommes, pas responsable, donc pas coupable!
Je reviendrai sur d'autres expériences aux résultats tout aussi surprenants... et inquiétants